En 2010 Roland dit Pilou, Pierre, Jeff, Joel et mon père ouvraient un des bras amont de la clue d’Amen, Les photos et leurs récits donnaient bien envie. peu après, nous ouvrions le second bras principal avec Jeremy et Jeff et l’idée d’enchaîner les tronçons supérieurs de la clue d’Amen aux parties « classiques » naissait. Il aura fallu attendre 2014 pour que nous y allions enfin. A ma connaissance, il s’agit de la première tentative d’enchaînement intégral. Tentative car en effet on a pas réussi à tout faire.
Qu’est ce que donc l’enchaînement d’Amen? Ça consiste à :
- Faire une longue marche d’approche depuis Liouc via col de Roua, Basse et haute Mihubi et col de Sui (D+ 700, 2h30)
- Descendre Le bras le plus long des amonts d’Amen : Fraccietta depuis l’altitude 1720 jusqu’à la confluence avec le collecteur vers 1160. Une quinzaine de rappels jusqu’à 25 mètres et une quantité énorme de désescalades techniques.
- Descendre la partie supérieure d’Amen jusqu’au départ classique à 1063m
- Enchaîner les parties classiques jusqu’à l’arrivée à 700m
On a choisi l’option bivouac au col, mais ça peut passer sans pour des équipes rapides. On a évité la partie finale parce que le débit était devenu vraiment trop fort. La pélite rouge étant imperméable, l’eau monte tout le long de la descente sans subir la moindre pertes comme dans les roches calcaire. On a eu beaucoup d’eau, trop pour une équipe normale « à vue ». Il est important de préciser que nous étions deux pratiquants très expérimentés, professionnels de l’activité et que la proximité de mon logement fait que je connais vraiment très bien ce canyon : on y est pas allé la fleur au fusil comme beaucoup de pratiquants que l’on croise l’été!!
On est face à un gros morceau du 06 avec 1000 mètres de dénivelé pour 5/6 kilomètres de progression et près de 40 rappels. Et aussi un des canyons les plus délicat vis à vis de la météo avec des risques de vagues de crue. La roche est glissante, le téléphone ne passe pas, il y a des loups et des chamois carnivores.
Parlons maintenant des choses rigolotes. :p
Arrivé au bivouac, on constate une invasion de moustiques carnivores et on tente donc de les éloigner par enfumage de branches de pin. La nuit sera agitées car une combi néoprène en coussin n’offre qu’un confort relatif. Vers 5 heures du matin on se retrouve dans les nuages, l’ambiance est glauque et entendre un petit animal de la forêt passer à quelques mètres m’ôtera toute envie de finir ma nuit de sommeil. Bref la nuit fut agitée, et malgré un spot de bivouac de rêve, le réveil est difficile.
Après avoir avalé une salade de riz emballé dans un sac congélation (appétissant au réveil!!) on enfile directement les néoprènes et attaquons directement le talweg sous le col. C’est sensé être embroussaillé mais en fait la progression est agréable avec des désescalades dans des diaclases bien étroites et une apparition prématurée de l’eau. En effet, la veille un énorme orage est tombé le matin chargeant tous les vallons en eau. Lors de la navette, on a pu constater qu’Amen était en crue, on a misé sur une décrue rapide, la suite nous prouvera que c’était presque gagné.
Le vallon est très vite intéressant, d’autant plus que le débit devient vite correct grâce aux nombreux affluents. On enchaîne les rappels et désescalades pendant une heure et demi, on avance très vite et on se retrouve dans le collecteur. Celui ci double le débit, on fait une pause grignotage et on enlève le sable des chaussures.
On suit ensuite le collecteur, le débit est maintenant fort mais ne pose aucun problème. On croise quelques beaux passages, on marche mais c’est éprouvant car l’eau trouble cache le fond. Seconde pause au pont du départ classique une heure plus tard. On est un peu entamé, on a avancé vite et nos sacs sont lourds.
Le débit ne nous pose pas alors trop de problème, on choisi donc de continuer. Je connais particulièrement bien cette partie avec ses « shunt » et échappatoires possibles, ce qui permet de gagner un temps énorme. Sauf que l’impression du collecteur se confirme, les limons transportés par la crue ont comblé tous les bassins, aucun sauts ne sera possible. Autre observation assez rapide, c’est que le débit augmente considérablement à chaque ruissellement affluent, il double ou triple quasiment entre la passerelle et le premier étroit. Il va falloir faire vraiment gaffe maintenant. On passe sans encombre le premier encaissement, on prend les shunt dans la partie de jonction. Je sais qu’il n’y a plus qu’un encaissement marqué avant l’échappatoire, il est étroit et était mal équipé. Le CG est passé entre temps et quelques points salvateurs sont apparus. Pas assez malheureusement et certaines désescalades sont délicates avec une veine d’eau qui dépasse les 200l/s maintenant. Néanmoins, on se régale, c’est une grande ambiance.
Arrivé devant l’échappatoire, la tentation de continuer existe, mais je sais que même si l’encaissement ne nous poserait pas de problèmes – la première cascade de l’encaissement n’est pas impressionnante et fausse la réalité de la suite – la dernière cascade en poserait un conséquent. Avec beaucoup moins d’eau le franchissement des deux dernières vasques suspendues est déjà très délicat. Là il faudrait nager en recevant toute la gerbe d’eau dessus pour rétablir sur le déversoir et aller au relais… sauf que la gerbe crée un rappel d’eau repoussant de l’accès au déversoir. Il est plus intelligent de renoncer que d’aller au carton. De plus les nuages ont changé d’aspect, ce ne sont plus des brumes mais de gros congestus. En bas de l’éboulis,on jette un dernier regard sur le final, satisfait de notre journée. Il est temps de remonter le pierrier et rentrer ranger le matos en laissant l’orage éclater derrière nous.
On aura mis 6 heures avec un gros rythme en connaissant bien la partie classique, correctement la partie supérieur du collecteur mais en perdant du temps avec des sacs « bivouac », l’eau trouble et le fort débit. Le premier enchaînement reste à faire, avis aux amateurs.
A noter que cette sortie est proposé dans le cadre de mes prestations professionnelle. A réserver aux plus sportifs!!
A reblogué ceci sur canyoning dans les alpes maritimeset a ajouté:
Première tentative de parcours de l’intégrale de la clue d’Amen, une belle aventure!!
[…] plus sportifs d’entre vous, des challenges à votre hauteur sont possibles avec notamment la clue d’Amen et de Raton dans la fameuse pélite rouge. Et pourquoi pas se frotter au plus grand canyon […]
[…] déjà parcouru les gorges de Daluis en randonnée, en canyon, en cascade de glace, skié sur les sommets alentours. Adolescent, je les avait parcouru en raft et […]