Courant novembre mon équipier François m’appelle et me dit que les billets d’avion pour le Maroc sont au plus bas et que c’est le bon moment pour une aventure. D’autant plus qu’on bénéficie d’un transport maritimes puis terrestre pour nos bagages lourds et qu’on peut partir léger. J’ai pas de travail pour le moment alors zou, allons découvrir.
Il n’y avait pas vraiment de programme à part débarquer à Fes, récupérer la voiture de location et poser mon équipier à Erfoud avant de reprendre l’avion. On a imaginé un trajet descendant par Ifrane, Midelt, Beni Mellal avant de rentrer plein sud dans le haut Atlas vers Zaouit Ansahal. Passer à Imi’n’warn puis descendre au sud vers Ourzazate, Dadès puis Erfoud, Rissani. Forcément j’ai pas pu m’empêcher de regarder google earth et de voir plein de canyons par satellite sans la moindre information.
Avant de parler canyon, je voudrais parler de mon ressenti sur le pays. J’ai pas mal voyagé en Europe et en Amérique du nord, c’était donc la première fois que je mettais les pieds au Maghreb et en Afrique. J’ai déjà vu la pauvreté, j’ai été proche de zones de conflits que ce soit en Albanie/Kosovo ou en Ossétie/Tchéchénie ou en Bosnie. Pourtant en arrivant au Maroc et durant une bonne partie du voyage j’ai ressenti une forme de malaise. La culture marocaine est basée sur l’hospitalité, pourtant le lien à l’argent et à l’image de l’européen occidental n’est jamais loin. A juste titre, quelques dirhams pour nous ne représentent rien, mais changent pas mal de choses pour les locaux. On est constamment en interaction, toujours dans un but de vente. Jamais on arrive à se mettre à un croisement, prendre la carte et se laisser porter par ses envies sans qu’une personne vienne proposer de vous conduire au restaurant ou à l’hotel ou au marchant de tapis du coin. Je ne parle pas de s’arrêter pisser au bord de la route en plein nulle part où on a pas le temps de finir la petite affaire qu’un gars est déjà arrivé en courant pour vendre des cailloux.
François connait ces us et coutumes et y est habitué. Il travaille assez fréquemment sur place. Il m’a servi de guide dans les relations locales bien souvent. Je conseille vraiment d’y aller avec quelqu’un qui sait à quoi s’attendre, encore mieux si c’est un marocain que vous connaissez, là la condition du touriste s’atténuera et vous deviendrez peut-être un voyageur.
Dernière chose avant de parler canyon : la sécurité.
J’écris cet article trois jours après l’assassinat des deux touristes scandinaves. A une dizaine de jours près on les croisait dans l’Atlas. Ce n’est pas évident d’être totalement objectif en étant touché par cette tragédie. Pour moi ce pays n’est pas plus dangereux qu’un autre mais donne une drôle d’impression liée à mon paragraphe précédent. Pourtant la probabilité d’une mauvaise rencontre est la même que chez nous. Vous allez rencontrer des enfants, des femmes, des agriculteurs, des bergers, des marchands, des vieillards, des gens riches, des gens pauvres. Comme chez nous quoi.
La Gendarmerie royale est très présente, tout comme l’armée et dégage une certaine crainte. Les vols sont peut être même moins fréquents que dans nos grosses agglomérations françaises. A aucun moment on s’est inquiété pour notre matériel. Pourtant un autre culture est présente avec ses spécificités, ce sera vous l’étranger. De votre comportement dépendra celui de l’autre. Comme partout en fait.
Le canyonisme au Maroc Quand j’ai commencé à chercher des idées, j’ai posé la question à google.
- Premier constat, deux ou trois professionnels travaillent le pays. Cool je suis pro aussi, je vais leur poser des questions de confrère à confrère : choux blanc pas choukran, dommage. Julien, un collègue français m’aide bien plus, merci à lui.
- Seconde référence : descente-canyon.com et là il n’y a pas grand chose. Les sites collaboratifs marchent mieux pour les canyons d’intérêt relatif en France que pour les canyons d’aventures à l’étranger.
- Bref on revient sur les bonnes bases : google earth et là vu du ciel, il semble y avoir pas mal de choses mais avec deux problématique de base. L’échelle et les accès. Le pays est immense et il faut vraiment zoomer fort pour voir quoi que ce soit. Et quand forcément on trouve quelque-chose vu qu’il y a des canyons partout, on réalise que c’est pas du tout facile d’accès.
Très vite je comprends qu’il ne va pas falloir être tout feu tout flamme et qu’on va mélanger balade dans le pays et se poser sur certains sites et optimiser l’activité canyon.
Premier secteur la vallée de l’Ahansal vers Bin el Ouidane.
On commence avec du clé en main avec un canyon décrit sur descente-canyon.com et un autre conseillé par mon confrère verdonien le même jour dans les environs de Bin el Ouidane. Les précipitations récentes ont tout mis en eau et on se régale. L’équipement est même très bon. On dort au gite de la cathédrale où on y rencontre Moha. Ce canyoniste est formé par des guides français qui mettent en place aussi un cursus de formation au niveau de l’état.
On discute quelques temps et les objectifs les plus pertinents ne sont pas en conditions. Il reste d’autres canyons mais notre interlocuteur reste flou sur leur localisation et l’intérêt. Bref on a un pays à visiter alors on reprend la route.
Cette vallée reste en tous cas un spot fabuleux d’escalade, d’eau vive, de randonnée et de canyon. Il y a de quoi y rester une bonne semaine. Le plus dur étant d’avoir les bonnes infos…
On reprends la route dans le haut Atlas, on traverses de nombreux villages et des paysages à couper le souffle. On s’arrêtera au village de Megdaz où on passera du temps à discuter avec des médecins français qui s’occupent du dispensaire. Rien n’est rose encore au Maroc et c’est pas près d’évoluer. C’est beau de voir cet investissement humain et conforte quelques idées d’humanisme. On finit par arriver sur un des autres objectifs du voyage, au sud et plus au chaud. La vallée de Dadès.
Second secteur la vallée de Dadès vers Tinghir.
Dadès a un coté étrange entre ces villages où le temps ne s’est pas écoulé et ces hôtels qui poussent comme des champignons à quelques mètres les un des autres. Pourtant il y a de quoi y passer un bon moment et j’ai ressenti une plus grande facilité aux rencontres. On a descendu cinq canyons voir plus selon la définition du mot. Le potentiel est énorme mais beaucoup de choses ont là aussi été faites.
Comme les informations n’existaient pas, j’ai mis pas mal de choses à jour sur descente-canyon.com. L’équipement est beaucoup moins bon que dans l’Ahansal. Variant du rien du tout qui est potentiellement une ouverture, aux points coupés, volés ou franchement pourris avec de temps en temps un ancrage surdimensionné. Certaines approches sont bien musclées voir nécessitent un accompagnement avec des locaux et des mules ce qui peut générer de grands moments de partages.
Le terrain d’aventure en canyon
Au Maroc ce terme reprend son sens autant dans l’approche, la descente que le retour. Il faudra user de vos capacité de navigation en montagne ou milieu désertique avec des cartes plus ou moins justes. Il faudra surtout avoir une paire de jumelles et compter sur votre instinct pour trouver les passes idéales.
Dans les canyons le débit posera rarement problème, le manque d’équipement déjà plus. Il faudra soit partir lourd avec perforateur et points soit imaginer des stratagèmes pour franchir les cascades avec l’équipement que vous aurez.
La créativité prime alors, tout en devant être irréprochable en terme de sécurité vu qu’il n’y a pas de secours sur place. Il faut regarder si une lunule existe, si un crochetage quelconque est possible. Construire des corps morts ou passer la corde autour d’une formation rocheuse.
J’en profite pour faire un peu de publicité. Si vous êtes intéressé pour apprendre des techniques du genre j’en propose en formation.
Bref le Maroc…
Une belle terre à découvrir. Sur laquelle il faudra prendre votre temps, chercher la bonne rencontre, rester dans un endroit pour découvrir ses secrets. Une terre d’aventure humaine et sportive. Un endroit où vous serez l’étranger, allez y!