Bref je suis retourné en Oman
C’était à moitié prévu depuis l’explo précédente d’avant le COVID mais avec la formation kayak en 2021/22 et le stress attenant, j’ai bien failli ne pas y aller. Philippe A et Johan B auront été convainquant, on allait faire de la belle première en spéléo et en canyon dans le Dhofar, à la frontière du Yemen, rencontrer des gens, voyager, bien manger. Bref le plan sans accroc.
Quelques semaines avant, j’avais épluché les vues satellites, posé près de 50 curseurs de choses à aller voir, partagé ces documents, acheté du matos au top, plastifié mes topos, pesé le moindre gramme, bref j’étais au top. Un beau projet et tout qui allait avec. La veille du départ, le test COVID était négatif, le passeport près à être tamponné, c’était parti.
Le contrôle à la douane se passe bien. J’étais très inquiet parce que j’avais laissé la douane sous quelques noms d’oiseaux deux ans avant, avec mon équipier qui négociait avec le pilote de Turkish Airlines pour m’attendre, tout ça pour régler une simple amende de 30 euros pour voiture pas lavée avant d’entrer dans la capitale…
Mais les aventures commencèrent à cet instant. Après le passage à la douane, au moment de récupérer mon bagage, qui n’est jamais apparu au bout du tapis roulant. Au moment d’écrire ces lignes, un an après, je suspecte les agents de la sécurité d’Amsterdam d’avoir trop bien fait leur boulot et moi d’avoir omis de noter mon nom sur mon bagage…
Du coup se retrouver à 12 heures d’avion de chez soi avec uniquement un matelas gonflable, un duvet et les vêtements que je portais devenait une nouvelle aventure en soi. Autant dire que le plan ne se déroulait plus sans accroc et qu’on allait naviguer à vue. Deux voitures d’équipiers prennent la route de Salalah, seuls Johan et Nico restent avec moi, on part pour repérer quelques projets dans le nord du pays en attendant 3 jours la réponse de l’aéroport d’Amsterdam et le vol suivant.


Petit spoil du futur, l’aéroport a vraiment perdu mon bagage et 3 jours après je saurais que tout le projet de deux ans est tombé à l’eau pour moi… et mes équipiers d’infortune.


Durant ces trois jours d’attente et via la magie des réseaux sociaux, on rencontre Flo. Un expat français à Dubaï qui pratique la spéléo et le canyon avec le MECET (middle east caving exploration team). Il passe chez une amie qui lui prête son matos perso et je me retrouve toujours avec pas grand chose, mais avec un baudrier et un casque, l’espoir renait. On part donc dans le massif du djebel Akdhar repérer quelques canyons et même en ouvrir quelques uns et en répéter d’autres durant une grosse semaine.

Alors le désert arabique en hiver n’est pas spécialement l’endroit le plus froid, même au contraire, on peut se prendre de gros coup de chaud. Mais l’eau n’est pas tiède pour autant et il y a toujours un bassin ou deux pour rendre l’aventure bien piquante.
On parcourt un affluent du wadi Jamal un poil en aval de Lunules fait deux ans auparavant. Gros coup de chance, c’est somptueux, petite malchance, on trouvera quelques sangles par endroit. Et des traces de passage des omanais absolument improbables!





On prospecte un énorme wadi en rive gauche du collecteur arrivant à Al Awabi, un autre moins gros avec moins de chance, des énormes champs de pierre ponctués par de micro-encaissements. Les balades sont incroyables dans ces montagnes rugueuses où on a du mal à imaginer que des générations de Bédoins ont réussi à vivre.
On profite de l’expérience de Flo avec les locaux et les bons plans. En effet, il parle quelques mots arabes et attire la sympathie de chaque interlocuteur. Notre estomac appréciera!

Quelques jours plus tard, on apprend que le sac a été retrouvé et qu’il sera expédié à 3/4 jours du vol retour. Les équipiers sur Salalah rentrent plus tôt que prévus parce que toutes les explorations du sud avaient été vue par des locaux et que le démon de la première les faisait remonter vers notre position. On partage quelques canyons plus ou moins classiques du côté du wadi Bani Awf et une belle ouverture spéléo avant les derniers jours.




Quand je récupère enfin mon sac, il ne reste que très peu de temps et je projette de parcourir wadi Halfain, un des plus beaux wadi d’Oman et même d’Arabie. plus de 1000 mètres de dénivelé, 4 cascades de plus de 100 mètres, une de 300 qu’on contournera, un bivouac sous des parois de 1500 mètres avec le seul bruit des oiseaux et du ruissellement de l’eau.










Le voyage se termine, on partage encore quelques beaux moments tous ensembles avant de rentrer sous la grisaille européenne et la routine habituelle.

En écrivant ces lignes, je partage les émotions d’une expé avec ses moments de joie, de peur mais je ressens aussi les doutes quant aux responsabilités que représentent un voyage en avion de longue distance au moment où la planète se réchauffe de plus en plus vite. Je reste pourtant persuadé qu’il faut voyager, pour plusieurs raisons.

La première est de partager ce voyage au travers de l’écriture, de la photo ou du film. Beaucoup de personnes n’oseront jamais l’aventure et lire des récits est un moyen pour eux de vibrer à travers les mots et les images.
C’est aussi un moyen de rencontrer l’autre, autres cultures, autres mentalités, autres vies et de s’en inspirer. Comprendre l’autre au delà des frontières permet de ne pas s’enfoncer dans les siennes. On est à un tournant de société où le repli vers soi devient inquiétant et il est indispensable de continuer à croiser d’autres façons de vivre.
Enfin, il est important aussi d’observer les adaptations que chacun utilise afin d’élargir la connaissance au delà de nos frontières encore une fois. Ce point concerne par exemple Oman et sa gestion de l’eau. C’est un des pays les plus désertique au monde et ils ont moins de problèmes que nous en Europe grâce à une plus grande modération de leurs usages.
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